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PRÉFACE.

Je me suis peut-être laissé éblouir par le sujet : il m’a semblé fécond. On voit en effet, au premier coup d’œil, qu’il met à ma disposition l’antiquité profane et sacrée. En outre, j’ai trouvé moyen, par le récit et par le cours des événements, d’amener la peinture des différentes provinces de l’empire romain ; j’ai conduit le lecteur chez les Francs et les Gaulois, au berceau de nos ancêtres. La Grèce, l’Italie, la Judée, l’Égypte, Sparte, Athènes, Rome, Naples, Jérusalem, Memphis, les vallons de l’Arcadie, les déserts de la Thébaïde, sont les autres points de vue ou les perspectives du tableau.

Les personnages sont presque tous historiques. On sait quel monstre fut Galérius. J’ai fait Dioclétien un peu meilleur et un peu plus grand qu’il ne le paroît dans les auteurs de son temps ; en cela j’ai prouvé mon impartialité. J’ai rejeté tout l’odieux de la persécution sur Galérius et sur Hiéroclès.

Lactance dit en propres mots :

Deinde… in Hieroclem, ex vicario prœsidem, qui auctor et consiliarius ad faciendam persecutionem fuit[1].

« … Hiéroclès, qui fut l’instigateur et l’auteur de la persécution. »

Tillemont, après avoir parlé du conseil où l’on mit en délibération la mort des chrétiens, ajoute :

« Dioclétien consentit à remettre la chose au conseil, afin de se décharger de la haine de cette résolution sur ceux qui l’avaient conseillée. On appela à cette délibération quelques officiers de justice et de guerre, lesquels, soit par inclination propre, soit par complaisance, appuyèrent le sentiment de Galérius. Hiéroclès fut un des plus ardents à conseiller la persécution[2]. »

Ce gouverneur d’Alexandrie fit souffrir des maux affreux à l’Église, selon le témoignage de toute l’histoire. Hiéroclès était sophiste, et en massacrant les chrétiens il publia contre eux un ouvrage intitulé Philaléthès, ou Ami de la vérité. Eusèbe [3] en a réfuté une partie dans un traité que nous avons encore ; c’est aussi pour y répondre que Lactance a composé ses Institutions [4]. Pearson [Dans ses prolégomènes sur les ouvrages d’Hiéroclès, impr. en 1673, t. II, p. 3-19. (N.d.A.)] a cru que l’Hiéroclès persécuteur des chrétiens était le même que l’auteur du Commentaire sur les vers dorés de Pythagore. Tillemont [Mem. eccles., t. V, 2e édit., in-4 o. Paris, 1702. (N.d.A.)] semble se ranger à l’avis du savant évêque de Chester ; et Jonsius [De Scriptoribus historioe philosophicoe Francof., 1659, lib. III, cap. XVIII. (N.d.A.)], qui veut

  1. De Mortib. persec., cap. XVI.
  2. Mém. ecclés., t. V, p. 20, édit. in-4o. Paris.
  3. Eusebii Cæsariensis in Hieroclem Liber, cum Philostrato editus. Paris, 1608.
  4. [Lact., Instit., lib. V, cap. II. (N.d.A.)]