tout homme qui près d'arriver au pouvoir s'y veut maintenir, était devenue l'arme de Cromwell : il avait fait publier une amnistie générale, et se montrait favorable aux royalistes ; il les trouvait par principe moins opposés que les autres partis à l'autorité d'un seul, et à son tour il avait besoin de fidélité.
Les communes qui se sentaient attaquées, essayèrent de se défendre : tantôt elles se plaignaient des calomnies que Cromwell faisait semer contre elles ; tantôt elles songeaient encore à se perpétuer d'une manière moins directe, en procédant à l'élection des places vacantes au parlement. Cromwell ne s'endormait pas ; il présidait à des assemblées, à des colloques, à des traités entre les partis, et trompait tout le monde. Le colonel Harrison, franc républicain, mais aveugle d'esprit, prétendait toujours que le général, loin de se vouloir faire roi, ne songeait qu'à préparer le règne de Jésus. « Que Jésus vienne donc vite, répondit le major Streater, ou il arrivera trop tard. » Cromwell, de son côté, déclarait que le psaume CXe l'encourageait à mettre la nation en république : et à cette fin il engageait le comité d'officiers à présenter des pétitions qui devaient amener, par l'opposition des parlementaires, la destruction de la république. Une de ces pétitions demandait le payement des arrérages de l'armée et la réforme des abus ; une autre sollicitait la dissolution immédiate du parlement et la nomination d'un conseil pour gouverner l'Etat jusqu'à la prochaine convocation du parlement nouveau. Emportées par leur ressentiment, les communes déclarèrent que quiconque présenterait à l'avenir de pareilles doléances serait coupable de haute trahison. On vint apprendre cette résolution à Cromwell, qui s'y attendait. Il s'écria, animé d'une feinte colère, au milieu des officiers : « Major général Vernon, je me vois forcé de faire une chose qui me fait dresser les cheveux sur la tête. » Il prend trois cents soldats, marche à Westminster, laisse les trois cents soldats en dehors, et pénètre seul dans la chambre : il était député.
Il écoute un moment en silence la délibération, puis appelant Harrison, membre comme lui de l'assemblée, il lui dit à l'oreille : « Il est temps de dissoudre le parlement. » Harrison répondit : « C'est une dangereuse affaire, songez-y bien. »
Cromwell attend encore ; puis se levant tout à coup, il accable les communes d'outrages, les accuse de servitude, de cruauté, d'injustice : « Cédez la place, s'écrie-t-il en fureur, le Seigneur en a fini avec vous ! il a choisi d'autres instruments de ses oeuvres. » Sir Peters Wentworth veut répondre ; Cromwell l'interrompt : « Je ferai cesser ce bavardage. Vous n'êtes pas un parlement ; je vous dis que vous n'êtes pas un parlement. »