Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 10.djvu/400

Cette page n’a pas encore été corrigée

appuyèrent cette demande. Louis XVI fut victime de la violence d'un corps politique. Charles Ier ne succomba qu'à l'animosité de la faction militaire : ses accusateurs, une partie de ses juges, et jusqu'à ses bourreaux, furent des officiers.

Epouvanté de tant de démarches audacieuses, le parlement presse les négociations avec l'auguste prisonnier, afin d'opposer le pouvoir de la couronne au pouvoir de la soldatesque : pour toute réponse Cromwell marche sur Londres.

En même temps l'ordre est expédié au colonel Hammond, dans l'île de Wight, d'aller rejoindre le général Fairfax et de remettre la garde de la personne du roi au colonel Ewers.

Le parlement défend à Hammond d'obéir : Hammond se serait soumis aux ordres de l'autorité civile ; mais trouvant les soldats de la garnison disposés à la révolte, il partit pour le camp, où on l'arrêta. Le roi fut saisi, conduit de l'île de Wight au château de Hurst, et bientôt à Windsor. Charles avait envoyé son ultimatum aux communes, et avait promis à Hammond d'attendre vingt jours dans l'île de Wight la réponse définitive du parlement ; il ne tenta donc point de s'échapper, ce qu'il aurait pu faire aisément : sa fidélité à sa parole le conduisit à l'échafaud ; l'honneur du prince fit le crime de la nation.

Les indépendants avaient précédemment expulsé de la chambre élective les presbytériens les plus probes ; ils en allaient être chassés à leur tour. Ce fut la seule circonstance où ces fameuses communes montrèrent du courage : à la face de l'armée, qui assiégeait les portes de Westminster, elles déclarèrent que les conditions venues de l'île de Wight étaient suffisantes et qu'on pouvait conclure un traité avec le roi. Les grandes résolutions tardives ne réussissent presque jamais, parce que, n'appartenant ni à l'inspiration de la vertu ni à l'impulsion du caractère, elles ne sont que le résultat d'une position désespérée qui fait un moment surmonter la peur ; alors, l'on manque du courage suffisant pour soutenir ces résolutions, ou des moyens nécessaires pour les exécuter.

L'équitable histoire doit remarquer que ce vote des communes fut principalement l'ouvrage de Prynne, de ce presbytérien si persécuté par le parti de la couronne et de l'épiscopat, de cet homme qui pour l'indépendance de ses opinions avait subi deux fois la mutilation, trois fois l'exposition au pilori, huit années de prison et des amendes considérables.

Le lendemain de la résolution parlementaire, le colonel Pride, charretier par état, arrêta quarante-sept membres des communes lorsqu'ils se présentèrent aux portes de Westminster. Le jour suivant,