qu'il conçut l'idée d'une république quand on ne songeait encore qu'aux privilèges parlementaires.
Hampden prenait une partie de sa force dans la flexibilité de ses talents : son éloquence et son esprit étaient à volonté concis ou diffus, clairs ou embarrassés, et cette obscurité, dont il était le maître, lui donnait plus de puissance en le rattachant aux défauts de son siècle. Tantôt il résumait les débats du parlement avec une précision admirable, quand ces débats menaient au triomphe de son opinion ; tantôt il embrouillait la question de manière à la faire ajourner, si elle paraissait se résoudre contre son avis. Poli et modeste avec art, paraissant se défier de son jugement et céder à celui d'autrui, il finissait toujours par emporter ce qu'il désirait. Intrépide à l'armée, profond dans la connaissance des hommes, lui seul devina Cromwell, alors que la foule n'apercevait encore rien dans ce destructeur du trône des Stuarts. Sylla pénétra de même l'âme de César : les aigles voient de loin et de haut. On a cru pourtant qu'Hampden fut tenté par la proposition à lui faite d'être gouverneur du prince de Galles, s'il voulait, avec Pym et Hollis, s'engager à sauver Strafford [1] .
Sombre, vindicatif, implacable, Saint-John formait avec Pym et Hampden le triumvirat qui dominait la nation. Ces trois hommes se servaient encore du fanatisme de Fiennes et des talents de sir Henry Vane.
Celui-ci joignait à une dissimulation profonde un esprit prompt et une parole mordante : dans la laideur bizarre de sa physionomie on croyait lire des destinées extraordinaires. Emporté par une imagination inquiète et ardente, libertin à Londres, puritain à Genève, séditieux à Boston, Vane excitait partout des troubles ; il enflammait les esprits pour des principes dont il se jouait. Après avoir traîné une vie d'aventures sur tous les rivages, il revint dans son pays, où la révolution semblait attirer et demander son fatal génie.
Strafford ayant été mis en accusation, le parlement crut qu'il était temps de recourir aux grandes mesures populaires. On fit sortir des prisons et promener en triomphe trois écrivains condamnés pour des libelles. Dans les temps de troubles, la licence de la presse est souvent confondue avec la liberté de la presse, et l'on se sert ensuite de la crainte qu'inspire la première pour enchaîner la seconde : Milton prit la plume en faveur de celle-ci. On trouve pour la première fois le grand nom de l'Homère anglais confondu parmi ceux des pamphlétaires du temps, comme on lit le nom d'Olivier Cromwell sur la liste
- ↑ Whitelocke. (N.d.A.)