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CCI.


LE RELEGUE banni à toute heure soupire
Apres le dous terroir de sa nativité,
Et n'a d'autre penser le ceur sollicité
Que de r'entrer au lieu qui cause son martire

Nous exilez du ciel, duquel nostre ame tire
Et vie & mouvement, remplis de lascheté
Nous vivons paresseus, en telle oisiveté
Que personne de nous à son retour n'aspire.

Du né jusqu'a la bouche est du fol raccourci
Le penser inconstant, heureus qui met souci
De retourner au lieu dont il prend sa naissance

Nous sejours n'est point eternel en ce lieu,
Chercons à l'avenir l'eternité en DIEU
Son royaume ne souffre aucune decadence.


CCII.


Ceus que l'on tient au camp les moins avanteureus
Pallissans de terreur au cliquetis des armes
Souventefois bouillans au milieu des allarmes,
Sont estimez de tous les plus chevaleureus:

Mais ceus qui desguisans leurs courages peureus
D'un parler arrogant, presomptueus gendarmes
Tranchent du Rodomont, aus plus chaudes vacarmes
De tous leurs compagnons sont les moins valeureus

Tel pallist au seul nom de la mort redoutable
Qui la souffre sans peur, & tel feint au semblable
De ne la craindre point, qui l'aborre & la fuit

Que nul doncque par trop s'orgueillisse ou s'abaisse
Courageus ou couart de sa force ou foiblesse
JESUS ou il luy play edifie & destruit.