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CLXXIX.


Celui lequel estoit de tout tems immortel
Pour toy s'est fait mortel, & toy peuple rebelle
Qui es né pour mourir de nature mortelle,
Tu maudis le trespas, & ne veus estre tel.

Se plaindre de la mort, c'est se plaindre mortel
Ou bien que tues né, ou ton ceur infidelle
Accuse du Seigneur la bonté paternelle
Qu'elle ta fait naistre homme & non Ange eternel.

Indigne toy plustot contre le premier pere
Qui suivant le conseil de l'infernal Vipere
T'a miserablement à la mort asservi ;

Et bien qu'il merita une telle vengence
De nostre Redempteur l'ineffable clemence
Par la mort de sa crois de la mort t'a ravi.


CLXXX.


Las ! verray je tousjours le pere d'imposture
Roy de l'obscurité, qui la terre circuit
Courant de tout costé, & rode jour & nuit
Pour perdre & devorer l'humaine cretature ;

Mon plonger salement en la puante ordure
Des vices impudens, & corrompant le fruit
Que mon ceur repentant heureusement produit,
Donner à mes pechez nouvelle nourriture ?

Encore que je sois enfant d'ire conceu
O bon DIEU si m'as tu au baptesme receu
Pour ton fils adoptif regeneré en grace.

Doncque permettras tu que le diable effronté
D'une eternelle mort mortellement defface
Ceux que tu as de mort par ta mort rachepté ?