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CLXXV.


Desormais eslougné du monde injurieus
Ma conversation dans le ciel sera mise,
Ou je verray de DIEU la majesté promise
Qui nous transformera en son cors precieus.

Telle est la charité du Seigneur glorieus
Qui nous donne la vieu & ne l'avons acquise,
Qui nous oste la mort, ou nostre gourmandise
Nous avoit asservi, pecheur malicieus.

J'ay tant receu d'effet de ta bonté supreme
Que je me veus du tout meffier de moy-mesme
Pour recouvrer en toy toute ayde & tout support.

Car ta sainte parole à bien tant de lumiere
Quelle nous luit encore siys l'horreur de la biere
Nous faisant voir la vie au milieu de la mort.


CLXXVI.


Broqual fils d'Apollon c'est une aspre bataille
Que l'estat de la vie, ou l'un s'en va blessé
Du trait d'ambition, & l'autre interessé
D'un fol desir d'honneur contre l'orgueil chamaille.

L'un jusqu'au fond du ceur l'avarice tenaille,
Et l'autre de l'envie injustement pressé
Cede à la calomnie, & le chef abaissé
De haine & de courrous il se ronge & travaille.

Icy je ne dis rien de tant d'oppressions
Qui tourmentent les cors de mille passions,
De goutte, fiebvre, peste, apostume, & gravelle.

Les seuls maus de l'esprit nous enseignent assez
Que bien-heureus sont ceus qui mourans sont passez
De ce combat mortel à la paix immortelle.