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esprits et estats de ceux qui les reçoivent : car ils exercent les bons, relevent et redressent les tombez et devoyez, punissent les meschans. De chascun un mot, car il en a esté traicté ailleurs. Ces maux externes sont aux bons un très utile exercice et très belle eschole, en laquelle (comme les athletes et escrimeurs, les mariniers en la tempeste, les soldats aux dangers, les philosophes en l’academie, et toutes autres sortes de gens en l’exercice serieux de leur profession) ils sont instruicts, duicts, faicts et formez à la vertu, à la constance et vaillance, à la victoire du monde et de la fortune. Ils apprennent à se cognoistre, ils s’essayent et voyent la mesure de leur valeur, la force et portée de leurs reins, jusques où ils doibvent esperer et promettre d’eux-mesmes ; puis s’encouragent et s’affermissent à mieux, s’accoustument et s’endurcissent à tout, se rendent resolus, determinez et invincibles, ou au contraire le long calme de la prosperité les relasche, ramollit et appoltronit : dont disoit Demetrius qu’il n’y avoit gens plus miserables que ceux qui n’avoient jamais senti de traverse et d’affliction, appellant leur vie la mer