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à personne de l’injurier, aussi ne peust-il recepvoir injure : (…). C’est un mur d’airain que l’on ne sçauroit penetrer ; les brocards, les injures, n’arrivent poinct jusques à luy. Joinct qu’il n’y aura celuy qui n’estime l’aggresseur meschant, et luy pour homme de bien ne meritant tel outrage. Quant à celuy qui vous a offensé, si vous le jugez impertinent et mal sage, traictez-le comme tel, et le laissez là ; s’il est autre, excusez-le, presumez qu’il en a eu occasion, que ce n’a pas esté par malice, mais par inadvertance et mesgarde : il en est fasché luy-mesme, et voudroit ne l’avoir pas faict. Encore diray-je que, comme bons mesnagers, nous debvons faire nostre profict, et nous servir de la commodité que nous presentent les injures et offenses. Ce que nous pouvons pour le moins en deux sortes, qui regardent l’offensant et l’offensé : l’une, qu’elles nous font cognoistre ceux qui nous les font, pour les fuyr une autre fois ; tel a mesdict de vous, concluez, il est malin ; et ne vous fiez plus à luy : l’autre, qu’elles nous monstrent nostre infirmité et l’endroict par lequel nous sommes battables, affin de le remparer, amender le deffaut, affin qu’un autre n’aye subject de nous en dire autant ou plus. Quelle plus belle vengeance peust-on prendre de ses ennemis, que de profiter