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en la main, et ne s’abandonner pas si profusement, que l’on s’en puisse repentir, si l’amitié venoit à se denouer. Item, d’ayder et secourir au besoin sans estre requis ; car l’amy est honteux, et luy couste de demander ce qu’il pense luy estre deu : item, n’estre importun à ses amis, comme ceux qui se plaignent tousiours à la maniere des femmes. Or toutes ces leçons, très salutaires ez amitiez ordinaires, n’ont poinct de lieu en ceste souveraine et parfaicte amitié. Nous sçaurons encore mieux cecy par la peincture et description de la parfaicte amitié, qui est une confusion de deux ames très libre, pleine et universelle. Voyci trois mots. 1 confusion, non seulement conjonction et joincture, comme des choses solides ; lesquelles tant bien attachées, meslées, et nouées soyent-elles, si peuvent-elles estre separées, et se cognoissent bien à part. Les ames en ceste parfaicte amitié sont tellement plongées et noyées l’une dedans l’autre, qu’elles ne se peuvent plus r’avoir ny ne veulent, à la maniere des choses liquides meslées e