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s’il est leur heritier, ou bien si elles sont au bien et profict public. Aussi se peust-il relever de ses promesses et conventions desraisonnables et mal faictes, tout ainsi et pour les mesmes causes que les particuliers se font relever par le benefice du prince. Il doibt aussi se souvenir que, combien qu’il soit par dessus la loy (civile et humaine s’entend) comme le createur par dessus sa creature (car la loy est l’œuvre du prince, laquelle il peust changer et abroger à son plaisir, c’est le propre droict de la souveraineté), si est-ce que cependant qu’elle est en vigueur et credit, il la doibt garder, vivre, agir et juger selon elle ; et ce luy seroit deshonneur et de très mauvais exemple d’aller au contraire, et comme se desmentir. Le grand Auguste, pour avoir une fois faict contre la loy en son propre faict, en pensa mourir de regret. Lycurgue, Agesilaüs, Seleucus, ont donné de très notables exemples en ceste part, et à leurs despens. Tiercement le prince est debiteur de justice à tous ses subjects, et doibt mesurer sa puissance au pied de la justice. C’est la propre vertu du prince vrayement royale et principesque, dont justement fust dict par une vieille au roy Philippe, qui dilayoit luy faire justice, disant n’avoir le loysir, qu’il desistast