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comme tyran ; le nourrir, non l’engraisser, luy monstrant qu’il ne vit pas pour luy, mais qu’il ne peust vivre icy bas sans luy. C’est addresse à l’ouvrier de sçavoir bien user et se servir de ses outils : aussi est-ce un grand advantage à l’homme de se sçavoir bien servir de son corps, et le rendre instrument propre à exercer la vertu. Au reste, le corps se conserve en bon estat par nourriture moderée et exercice bien reiglé. Comment l’esprit doibt avoir part et luy faire compagnie aux plaisirs, il a esté dict cy-dessus, et sera encore dict en la vertu de temperance. Quant aux biens et au debvoir d’un chascun en cest endroict, il y a plusieurs et divers offices : sont sciences differentes qu’amasser des biens, conserver, mesnager, emploitter et leur donner tour. Tel est sçavant en l’un, qui n’entend rien en l’autre, ny n’y est propre. L’acquisition a plus de parties que toutes les autres. L’emploitte est plus glorieuse et ambitieuse. La conservation et la garde, qui est propre à la femme, est sombre. Ce sont deux extremitez pareillement vicieuses ; aymer et affectionner les richesses, les hayr et rejetter. J’entends richesses ce qui est outre et par dessus la necessité