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du danger à le faire ouvertement, que ce soit par alliance secrette ; car c’est un tour de maistre de traicter alliance avec l’un au veu et sceu de tous, et avec l’autre par practique secrette, mais que ce soit sans perfidie et meschanceté, qui est deffendue ; mais non pas la prudence, mesmement pour la deffensifve et pour la seureté de son estat. Au reste, il y a plusieurs sortes et degrez d’alliances : la moindre et plus simple est pour le commerce et trafic seulement : mais ordinairement elle comprend amitié, commerce et hospitalité ; et elle est ou deffensifve seulement, ou deffensifve et offensifve ensemble, et avec exception de certains princes et estats, ou sans exception. La plus estroicte et parfaicte est celle qui est offensifve et deffensifve envers tous et contre tous, pour estre amy des amis, et ennemy des ennemis, et telle est bon de faire avec des puissans et par egale alliance. Aussi l’alliance est ou perpetuelle ou limitée à certain temps : ordinairement elle se faict perpetuelle ; mais le meilleur et plus asseuré est de la limiter à certain temps, affin d’avoir moyen de reformer, oster ou adjouster aux articles, ou s’en departir du tout s’il est besoin, selon que l’on jugera estre expedient. Et quand bien on les jugeroit telles qu’elles deussent estre perpetuelles, si est-ce qu’il vaut mieux les renouveller (ce que l’on peust et doibt-on faire avant que le temps expire) et renouer, que les faire perpetuelles : car elles s’allanguissent et se relaschent ;