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pour la necessité quelquesfois. Tiercement qu’en proposant et donnant bons et salutaires conseils, ils s’y portent librement et courageusement sans flatterie ou ambiguité et desguisement, n’accommodant poinct leur langage à la fortune presente du prince : (…). Mais, sans espargner la verité, ils disent ce qu’il convient. Car combien que la liberté, rondeur et fidelité, heurte et offense pour l’heure ceux ausquels elle s’oppose, après elle est reverée et estimée : (…). Et constamment sans ployer, varier et changer à tous propos pour plaire et suyvre l’humeur, le plaisir et la passion d’autruy, mais sans opiniastreté et esprit de contradiction, qui trouble et empesche toute bonne deliberation, voire quelquesfois faut tourner son opinion ; ce qui n’est inconstance, mais prudence. Car le sage ne marche pas tousiours d’un mesme pas, encore qu’il suyve mesme chemin ; il ne change poinct, il s’accommode : (…). Comme le bon marinier faict des voiles selon