Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/309

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il faut donc qu’il se couvre de ce bouclier de deffiance, que les sages ont estimé une grande partie de prudence et les nerfs de sagesse, c’est-à-dire veiller, ne rien croire, de tout se garder : et à cela l’induict le naturel du monde tout confit en menteries, feinct, fardé et dangereux, nommement près de luy en la cour et maisons des grands. Il faut donc qu’il se fie à fort peu de gens, et iceux cogneus de longue main, et essayez souvent : et encore ne faut-il qu’il leur lasche et abandonne tellement toute la corde, qu’il ne la tienne tousiours par un bout, et n’y aye l’œil. Mais il faut qu’il couvre et desguise sa deffiance, voire qu’en se deffiant il fasse mine et visage de se fier fort ; car la deffiance ouverte injurie et convie aussi bien à tromperie que la trop lasche fiance ; et plusieurs monstrant craincte d’estre trompez ont enseigné à l’estre, (…) : comme au contraire la fiance declarée a faict perdre l’envie de tromper, a obligé à loyauté, et engendré fidelité : (…). De la