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desrouille, la purifie et l’esclaircist du peché. En consequence de ce elle appaise l’ire divine, et nous tire des prisons et liens de la justice pour nous remettre au doux, beau et clair sejour de grace et misericorde ; finalement nous sevre du monde, nous tire de la mammelle, et nous desgouste par son aigreur comme l’absynthe au tettin de la nourrisse, du doux laict et appast de ceste vie trompeuse. Un grand et principal expedient pour se bien comporter en l’adversité, est d’estre homme de bien. L’homme vertueux est plus tranquille en l’adversité que le vicieux en la prosperité : comme ceux qui ont la fievre sentent avec plus de mal le froid et le chaud, et la rigueur de leurs accez, que ne font les sains le froid et le chaud de l’hyver et de l’esté : aussi ceux qui ont la conscience malade et en fievre sont bien plus tourmentez que les gens de bien ; car ayant l’interieur sain, ne peuvent estre incommodez par l’exterieur, où ils opposent un bon courage. Les adversitez sont de deux sortes : les unes sont vrayes et naturelles, comme maladies, douleurs, la perte des choses que nous aymons ; les autres faulses et feinctes par l’opinion commune ou particuliere, et non en verité. Qu’il soit ainsi, l’on a l’esprit et le