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condignes à celuy qui la luy a octroyée. Il n’y a rien indigne de nostre soin en ce present que Dieu nous a faict ; nous en sommes comptables jusques à un poil ; ce n’est pas une commission farcesque à l’homme de se conduire et sa vie selon sa condition naturelle ; Dieu la luy a donnée bien serieusement et expressement. Mais quelle folie et plus contre nature que d’estimer les actions vicieuses, pource qu’elles sont naturelles ; indignes, pource qu’elles sont necessaires ? Or c’est un très beau mariage de Dieu que la necessité et le plaisir : nature a très sagement voulu que les actions qu’elle nous a enjoinct pour nostre besoin, fussent aussi voluptueuses, nous y conviant non seulement par la raison, mais encore par l’appetit : et ceux icy veulent corrompre ses reigles ! C’est pareille faute et injustice de prendre à contre-cœur et condamner toutes voluptez, comme de les prendre trop à cœur et en abuser : il ne les faut ny courir, ny fuyr, mais les recepvoir et en user discrettement et moderement, comme sera tantost dict en la reigle.