Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/16

Cette page n’a pas encore été corrigée

Parquoy ils conseillent non seulement de ne tremper poinct, et se preserver net des opinions, desseins et affections populaires, mais encore de fuyr sur-tout la tourbe, la compagnie et conversation du vulgaire, d’autant que l’on n’en approche jamais sans son dommage et empirement. La frequentation du peuple est contagieuse et très dangereuse aux plus sages et fermes qui puissent estre ; car qui pourroit soustenir l’effort et la charge des vices venant avec si grande troupe ? Un seul exemple d’avarice ou de luxe faict beaucoup de mal. La compagnie d’un homme delicat amollit peu à peu ceux qui vivent avec luy. Un riche voisin allume nostre convoitise ; un homme desbauché et corrompu frappe par maniere de dire et applique son vice, ainsi qu’une rouille, au plus entier et plus net. Qu’adviendra-il donc de ces mœurs ausquelles tout le monde court à bride abattue ? Mais quoy ! Il est très rare et difficile de ce faire ; c’est chose plausible, et qui a grande apparence de bonté et justice, que suyvre la trace approuvée de tous ; le grand chemin battu trompe facilement ;