dit, dans un style un peu vieilli, son premier biographe
[1] : « Prévoyant que le chemin qu’il falloit
tenir pour s’advancer au palais luy seroit long et difficile, pour n’avoir alliance ni cognoissance avec des procureurs et solliciteurs de procez, et ne pouvant
s’abbaisser et captiver jusques-là, que de les courtiser,
caresser et rechercher, pour estre par eux employé
aux affaires (tant il avoit l’âme noble et généreuse !)
il quitta ceste vacation , et s’addona à bon
escient à l’estude de la théologie et à la lecture des
pères et docteurs de l’église ; et, parce qu’il avoit la
langue bien pendue , et qu’il s’estoit formé un style
libre et relevé par-dessus le commun des théologiens,
il s'exerça à la prédication de la parole de Dieu,
par permission des curez et pasteurs, où
incontinent il parut, et s’acquist une merveilleuse
réputation entre les plus doctes de ce tems-là,
mesme à l’endroit de plusieurs évesques et grands
prélats qui estoient lors en cette ville , et y avoit
presse entre eux à qui le pourvoit avoir en son
évesché ou diocèse ».
Ainsi la fortune de Charron, devenu prêtre, fut dès lors assurée. La reine Marguerite le choisit pour son prédicateur ordinaire ; et Henri IV, même avant son abjuration, prenait plaisir à l’entendre prêcher, assistait souvent à ses sermons. Aussi les faveurs de l’église, les bénéfices venaient-ils, pour ainsi dire, le chercher. Il fut successivement théologal de Bàzas, d’Acqs, de
- ↑ La Roche-Mailleta avocat, ami intime de Charron.