Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome I, 1827.djvu/72

Cette page n’a pas encore été corrigée
16
DE LA SAGESSE,


droicte en haut tendant au ciel, où il regarde, se voit et se cognoist comme en son miroir : tout à l’opposite de la plante qui a sa teste et racine dedans la terre, aussi est l’homme une plante divine, qui doit fleurir au ciel : La beste comme au milieu, est de travers, ayant ses deux extrémités vers les bords ou extrémités de l’horizon, plus ou moins. La cause de cette droicture, après la volonté de son maistre ouvrier, n’est proprement l’ame raisonnable, comme il se voit aux courbés , bossus, boiteux ; ny la ligne droicte de l’espine du dos, qui est aussi aux serpens ; ny la chaleur naturelle ou vitale, qui est pareille ou plus grande en certaines bestes, combien que tout cela y peut par avanture servir de quelque chose : mais ceste droicture est deue et convient à l’homme, et comme homme qui est le saint et divin animal :

Sanctius his animal mentisque capacius altæ ;[1]

et comme roy d’icy bas ; aux petites et particulières royautés y a certaine marque de majesté, comme il se voit au daulphin couronné, au serpent basilizé, au lyon avec son collier, sa couleur de poil et ses yeux, en l’aigle, au roy des abeilles. Ainsi l’homme, roy universel d’icy bas, marche la teste droicte, comme un maistre en sa maison, regente tout et en vient à bout par amour ou par force, domptant ou apprivoisant.

  1. « Animal plus saint que les autres, et plus capable d’une haute intelligence ».