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LVII
PRÉFACE.


leroit. Le sage monstre egalement en tons les deux son courage : ces delicats ne sont capables de l’un ny de l’autre, foibles en tous les deux.

Tiercement en tout ce que je propose, je ne pretends y obliger personne ; je presente seulement les choses, et les estalle comme sur le tablier. Je ne me metz point en cholere si l’on ne m’en croit, c’est à faire aux pedans. La passion temoigne que la raison n’y est pas, qui se tient par l'une à quelque chose, ne s’y tient pas par l’autre. Mais pourquoy se courroucent-ils ? est-ce que je ne suis pas par tout de leur advis ? Je ne me courrouce pas de ce qu’ils ne sont du mien : de ce que je dis des choses qui ne sont pas de leur goust ny du commun ? et c’est pourquoy je des dis : Je ne dis rien sans raison, s’ils la sçavent sentir et gouster ; s’ils en ont de meilleure qui destruise la mienne, je l’escouteray avec plaisir, et gratification h qui la dira. Et qu’ils ne pensent me battre d’authorité, de multitude d’allegations d’autruy, car tout cela a fort peu de crédit en mon endroit, sauf en matiere de religion, où la seule authorité vaut sans raison : C’est là son vray empire, comme par tout ailleurs la raison sans elle, comme a très bien recogneu saint Augustin. C’est une injuste tyrannie et folie enragée de vouloir assubjettir les esprits à croire et suivre tout ce que les anciens ont dit, et ce que le peuple