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DE LA SAGESSE,

L'inégalité excessive des biens, vient de plusieurs causes, telles que les prêts contraires, les donations entre vifs, toutes les dispositions enfin qui enrichissent les uns aux dépens des autres ; c'est à cela qu'il faut remédier.

Exemples : Platon et Aristote.
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CE sont les deux elemens, et sources de tous desordres, troubles et remuemens qui sont au monde [1] ; car l’excessive richesse des uns les hausse et pousse à l’orgueil, aux delices, plaisirs, desdain des povres, à entreprendre et attenter ; l’extreme poureté des autres les meine en envie, jalousie extreme, despit, desespoir, et à tenter fortune. Platon les appelle pestes des republiques [2]. Mais qui des deux est la plus dangereuse, il n’est pas tout resolu entre tous. Selon Aristote, c’est l’abondance ; car l’estat ne doibt poinct redoubter ceux qui ne demandent qu’à vivre, mais

  1. « De toutes les causes de séditions et changemens, dit Bodin, il n'y en a point de plus grandes que les richesses excessives de peu de sujets, et la pauvreté extrême de la plupart ». De la Rép. L. V. chap. 2, initio.
  2. Plutarque appelle la pauvreté et l'avarice, les deux plus grandes et plus anciennes peste des ville et des États. Plutarque. Vie de Lycurgue. — Il dit ailleurs : « le point le plus important et le plus capable de rendre une ville heureuse, et d'y faire régner la concorde et l'union, est que, parmi les citoyens, il n'y ait ni pauvres ni riches. ». Id. Vie de Solon.