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DE LA SAGESSE,

santé, sagesse, vertu, et encore au dessoubs de l’habileté aux affaires [1] ; mais après cela je la mettrois aux mains et en concurrence avec la dignité, noblesse naturelle, vaillance militaire, et les laisseray volontiers disputer ensemble de la presseance : si j’estois pressé d’en dire mon advis, je la ferois marcher tout à costé d’elles, ou bien incontinent après.

Comme les sciences sont differentes en subjects et matieres, en l’apprentissage et acquisition, aussi sont-elles en l’utilité, honnesteté, necessité, et encore en la gloire et au gain : les unes sont theoriques et en pure speculation, les autres practiques et en action. Item, les unes sont reales, occupées en la cognoissance des choses qui sont hors de nous, soyent-elles naturelles, ou surnaturelles ; les autres sont parlieres, qui enseignent les langues, le parler, et le raisonner. Or desja, sans aucun doubte, celles qui ont plus d’honnesteté, utilité, necessité, et moins de gloire, vanité, gain mercenaire, sont de beaucoup à preferer aux autres. Parquoy tout absolument les practiques sont les meilleures qui regardent le bien de l’homme [2], apprennent à bien vivre et bien mourir, bien commander, bien obeyr, dont elles

  1. Charron traite plus en détail ce sujet, dans le chap. 14 du L. III.
  2. Selon Platon, ce qui est le plus avantageux à un être quelconque, est aussi ce qui a le plus de conformité avec sa nature. — Voy. de la Rép. L. IX.