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LIVRE I, CHAPITRE LXIII.
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CHAPITRE LXIII [1].

De la science.


SOMMAIRE. — Les uns estiment trop la science, les autres trop peu ; elle ne doit pas être préférée sans doute à la probité, à la vertu etc., mais elle doit marcher de pair avec la noblesse naturelle, la valeur, etc. Les sciences préférables aux autres, sont celles qui ne tendent pas à rendre la vie ou meilleure ou plus douce.

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LA science est à la verité un bel ornement, un outil très utile à qui en sçait bien user ; mais en quel rang il la faut tenir, tous n’en sont d’accord : sur quoy se commettent deux fautes contraires, l’estimer trop, et trop peu. Les uns l’estiment tant, qu’ils la preferent à toute autre chose, et pensent que c’est un souverain bien, quelque espece et rayon de divinité ; la cherchent avec faim, despense, et peine grande ; les autres la mesprisent, et desestiment ceux qui en font profession ; la mediocrité [2] est plus juste et asseurée. Je la mets beaucoup au dessoubs de la preud’homie [3],

  1. C'est le cinquante-septième chap. de la première édition.
  2. Ce mot signifie ici le milieu, l'opinion mitoyenne.
  3. « Le bon sens, sans le savoir, vaut mieux que le savoir sans le bon sens », dit Quintil. Instit. orator. L. VI, ch. 6.