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DE LA SAGESSE,

La personnelle et l’acquise a ses conditions toutes contraires et très bonnes ; elle est propre à son possesseur ; elle est tousjours en subject digne, et est très utile à autruy. Encore peust-on dire qu’elle est plus ancienne et plus rare que la naturelle ; car c’est par elle que la naturelle a commencé, et, en un mot, c’est la vraye qui consiste en bons et utiles effects, non en songe et imagination vaine et inutile, et provient de l’esprit et non du sang, qui n’est poinct autre aux nobles qu’aux autres : Qui generosus ? ad virtutem à naturâ benè compositus animus facit nobilem, cui ex quâcumque conditione supra fortunam licet surgere [1].

Mais elles sont très volontiers et souvent ensemble, et c’est chose parfaicte : la naturelle est un acheminement et occasion à la personnelle : les choses retournent facilement à leur principe et naturel. Comme la naturelle a prins son commencement et son estre de la personnelle, aussi elle ramene et conduict les siens à elle :

Fortes creantur fortibus[2].


Hoc unum in nobilitate bonum, ut nobilibus imposita

  1. « Quel est l'homme vraiment noble ? celui dont la nature a formé l'ame pour la vertu. Quelle que soit sa condition, il lui appartient de s'élever au-dessus de sa fortune ». Sen. epist. 44.
  2. « Les vaillans naissent des vaillans ». Hor. L. IV, ad. IV, v. 29.