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DE LA SAGESSE,


et malicieux, déloyal, mutin, séditieux, inconscient pour l'utilité publique, ennemi de tout gouvernement ; lâche dès qu'il craint, oppresseur s'il domine, ingrat et enfin féroce.

Exemples : Moïse et les Prophètes. — Socrates, Aristides, Phocion, Lycurgue, Démosthène, Themistocles.

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LE peuple (nous entendons icy le vulgaire, la tourbe et lie populaire, gens soubs quelque couvert que ce soit, de basse, servile et mechanique condition) est une beste estrange à plusieurs testes, et qui ne se peust bien descrire en peu de mots, inconstant et variable, sans arrest non plus que les vagues de la mer, il s’esmeut, il s’accoyse, il approuve et reprouve en un instant mesme chose ; il n’y a rien plus aisé que le pousser en telle passion que l’on veust ; il n’ayme la guerre pour sa fin, ny la paix pour le repos, sinon entant que de l’un à l’autre il y a tousiours du changement : la confusion luy faict desirer l’ordre ; et quand il y est, luy desplaist. Il court tousiours d’un contraire à l’autre ; de tous les temps, le seul futur le repaist : hi vulgi mores, odisse præsentia, ventura cupere, præterita celebare. [1].

  1. « Haïr le présent, désirer l'avenir, vanter le passé, tel est le caractère habituel du peuple ». — Tout ce paragraphe paraît avoir été tiré de Cicéron. Dans l'oraison pour Plancius, il dit : Non est enim consilium in vulgo, non ratio, non discrimen, non diligentia, etc. Vid. Orat. pro Plancio, §. 4.