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LIVRE I, CHAPITRE LI.


le droict de la mer et du bris [1], confiscation pour crime de leze majesté, puissance de changer la langue, tiltre de majesté.

La grandeur et souveraineté est tant desirée de tous, c’est pource que tout le bien qui y est paroist au dehors, et tout son mal est au dedans : aussi que commander aux autres est chose tant belle et divine, tant grande et difficile. Pour ces mesmes raisons sont estimés et reverés pour plus qu’hommes. Ceste creance est utile pour extorquer des peuples le respect et obeissance, nourrice de paix et de repos. Mais enfin ce sont hommes jettés et faicts au moule des autres, et assez souvent plus mal nez et mal partagez de nature que plusieurs du commun : il semble que leurs actions, pource qu’elles sont de grand poids et importance, soyent aussi produictes par causes poisantes et importantes ; mais il n’en est rien, c’est par mesmes ressorts que celles du commun. La mesme raison qui nous faict tanser [2] avec un voisin dresse entre les princes une guerre ; celle qui faict fouetter un laquais, tombant en un roy, faict ruiner une province. Ils veulent aussi legerement que nous, mais ils peuvent plus que nous : pareils appetits agitent une mou-

  1. Le droit de bris est celui que s'arrogent encore les paysans de Bretagne, de se partager les débris d'un navire naufragé sur leurs cotes. C'est un usage barbare qui remonte aux tems les plus reculés.
  2. Quereller.