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XLVII
PRÉFACE.


au laict nourricier, et premiere education, d’où l’on est dit bien nay ou mal nay, c’est a dire bien ou mal formé et disposé a la sagesse. L’on ne croit pas combien ce commencement est puissant et important, car si on le savoit, l’on y apporterait autre soin et diligence que l’on ne fait. C’est chose estrange et deplorable qu’une telle nonchalance de la vie, et bonne vie de ceux que nous voulons estre d’autres nous-mesmes. És moindres affaires nous y apportons du soin, de l’attention, du conseil : icy au plus grand et noble, nous n’y pensons point, tout par hazard et rencontre. Qui est celuy qui se remue, qui consulte, qui se met en devoir de faire ce qui est requis, de se garder et preparer comme il faut, pour faire des enfans masles, sains, spirituels, et propres à la sagesse ? Car ce qui sert a l’une de ces choses, sert aux autres, et l’intention de nature vise ensemble a tout cela. Or c’est a quoy on pense le moins ; à peine pense-t-on tout simplement a faire enfans , mais seulement, comme bestes, d’assouvir son plaisir : c’est une des plus remarquables et importantes fautes qui soit en une republique, dont personne ne s’advise, et ne se plaint, et n’y a aucune loy, reglement, ou advis public là dessus. Il est certain que si l’on s’y portoit comme il faut, nous aurions d’autres hommes que nous n’avons. Ce qui est re-