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LIVRE I, CHAPITRE XLIX.

Abraham. — Les Grecs. — Auguste. — Néron. — Fulvius. — Capius Tratius. — Manlius Torquatus. — Loi de Moïse. — Constantin le Grand Théodose, Justinien. — Les Juifs.

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IL y a plusieurs sortes et degrés d’authorité et puissance humaine, publique et privée ; mais il n’y en a point de plus naturelle ny plus grande que celle du pere sur les enfans (je dis pere, car la mere, qui est subjecte à son mary, ne peust proprement avoir les enfans en sa puissance et subjection) ; mais elle n’a pas toujours ny en tous lieux esté pareille. Anciennement presque par-tout elle estoit absolue et universelle sur la vie, la mort, la liberté, les biens, l’honneur, les actions et deportemens des enfans, comme sont de plaider, de se marier, acquerir biens ; sçavoir est chez les Romains [1] par la loy expresse de Romulus :

  1. Denys d'Halicarnasse dit que Romulus donna aux pères une puissance absolue sur leurs enfans, sans en limiter le tems ; qu'en vertu de ce pouvoir il leur était de les mettre ne prison, de les faire battre de verges, de les charger de fers, de les envoyer travailler à la campagne, et même de les faire mourir. Voici la loi : in liberos suprema patrum auctoritas est ; venundaré, occidare liceto. Il donna droit à un père de vendre son fils jusqu'à trois fois ; droit que les maîtres même n'avaient pas sur leurs esclaves. Un esclave qui avait été vendu une fois, s'il recouvrait sa liberté, n'était plus sujet à la servitude. Un fils, au contraire, ne devenait son maître qu'après avoir été vendu jusqu'à trois fois. Voici la