Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome I, 1827.djvu/401

Cette page n’a pas encore été corrigée
345
LIVRE I, CHAPITRE XLVII.


humaine, par dessus les autres ; mais ceux qui, d’une touche divine, et par quelque singuliere vertu et don du ciel, surpassent les autres, dont ils sont appellez heroes [1]. En l’obeir est l’utilité, l’aisance, la necessité ; tellement que, pour la conservation du public, il est encore plus requis que le bien commander ; et est beaucoup plus dangereux le desny d’obeir, ou le mal obeir, que le mal commander. Tout ainsi qu’au mariage, bien que le mary et la femme soyent egalement obligés à la loyauté et fidelité, et l’ayent tous deux promis par mesmes mots, mesmes ceremonies et solemnités, si est-ce que les inconveniens sortent, sans comparaison, plus grands de la faute et adultere de la femme que du mary : aussi bien que le commander et obeir soyent pareillement requis en tout estat et compagnie, si est-ce que les inconveniens sont bien plus dangereux de la desobeyssance des subjects que de la faute des commandans. Plusieurs estats ont longuement roulé et assez heureusement duré soubs de très meschans princes et magistrats, les subjects s’y accommodans et obeissans ; dont un sage interrogé pourquoy la republique de Sparte estoit si florissante, si c’estoit pource que les roys commandoient bien ;

  1. Platon, dans son dialogue intitulé Cratylus, donne une autre raison de cette dénomination. Les héros, dit-il, s'appellent ainsi, parcequ'ils sont nés du commerce de quelques dieux avec les mortelles ; etc.