ainsi mené, nous nous en fions et remettons à autruy :
unusquisque mavult credere quàm judicare ; versat nos et præcipitat traditus per manus error, ipsa consuetudo assentiendi periculosa et lubrica
[1]. Or ceste telle facilité populaire, bien que ce soit en verité foiblesse, toutesfois n’est pas sans
quelque presomption. Car c’est trop entreprendre
que croire adherer et tenir pour vray
et certain si legerement, sans sçavoir que c’est,
ou bien s’enquerir des causes, raisons, consequences,
et non de la verité. On dict, d’où
vient cela ? comment se faict cela ? presupposant
que cela est bien vray ; et il n’en est rien :
on traicte, agite les fondemens et effects de
mille choses qui ne furent jamais, dont tout
le pro et contra
[2]
est faux. Combien de bourdes,
fauls et supposez miracles, visions et revelations
reçeuës au monde, qui ne furent jamais ! (les vrays miracles autorisés par l'eglise, sont à part, l'on ne touche point à cela).
Et pourquoy croira-l’on une merveille, une
chose non humaine ny naturelle, quand l’on
peust destourner et elider la verification par
voye naturelle et humaine ?
- ↑ « Chacun aime mieux croire que juger. L'erreur passant de mains en mains, nous entraîine avec elle, et nous fait tomber dans le précipice ; l'habitude même de donner son assentiment n'est pas sans danger ». Sen. de Vita beata, cap. I.
- ↑ « Le pour et le contre ».
ils y restent attachés comme à un roc ». Cicer.Acad. Quœst. L. II, C. 3. — Ce qui, dans le texte, précède la citation, est triré des Questions académiques, même chapitre, no. 8.