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LIVRE I, CHAPITRE XLII.


bien que par contemplation, il monte et est porté en admiration, crainte, horreur, reverence de leur auteur et maistre souverain de tout, et en ce sens a esté bien dit par Anaxagoras [1] , que l'homme estoit creé pour contempler le ciel et le soleil, et par les autres philosophes appelans l'homme θεατής του ουρανού [2] ; des choses basses il en tire secours, service, commodité. Mais se persuader qu'en faisant toutes ces choses, l'on n'aye pensé qu'à l'homme, et qu'il soit la fin et le but de tous ces corps lumineux et incorruptibles, c'est une trop folle et hardie presomption.

Finalement, mais principalement, ceste presomption doibt estre considerée en l’homme mesme, c’est-à-dire pour le regard de soy et de l’homme son compagnon, au dedans, au progrez de son jugement et de ses opinions ; et au dehors en communication et conversation avec autruy. Sur quoy nous considererons trois choses, comme trois chefs qui s’entresuivent, où l’humanité monstre bien en sa sotte foiblesse sa folle presomption. La premiere au croire ou mescroire, où sont à noter deux vices contraires, qui sont ordinaires en la condition humaine. L’un et plus commun est une legereté, qui citò credit, levis

  1. V. Diogène-Laerce, Vie d'Anaxogoras, L. II, II. 10.
  2. « Contemplateur du ciel ».