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XL
PRÉFACE


tendus, reglans et instruisans non seulement le particulier, mais aussi le commun,et le public : enseignans ce qui est bon et utile aux familles, communautés, republiques et empires. La theologie est plus chiche et taciturne en cette part, visant principalement au bien et salut eternel d’un chascun. Davantage, les philosophes la traittent plus doucement et plaisamment, les theologiens plus austeremment et sechement. La philosophie qui est l'ainée, comme la nature est l'ainée de la grâce, et le naturel du surnaturel, semble suader gratieusement et vouloir plaire en profitant, comme la poësie :

... Simul et jucunda, et idonea dicere vitæ....
Lectorem delectando pariterque monendo[1].

Revetue et enrichie de discours, de raisons, invenations, et pointes ingénieuses, exemples, similitudes : parée de beaux dires, apophtegmes, mots sententieux, ornée d’eloquence et d’artifice. La theologie qui est venue après, toute refrongnée, semble commander et enjoindre imperieusement et magistralement : et de fait la vertu et profité des theologiens est toute chagrine, austere, subjette, triste, craintive et populaire : la

  1. « Dire des choses à la fois agréables, et utiles à la vie..., plaire au lecteur, et lui donner en même temps des avis ». Horace, Art poét. v. 334 et 344.