changement le delecte, au moins le
soulage ; il pense guarir le mal par un autre
mal : cela vient d’une opinion qui tient le
monde enchanté et miserable, qu’il n’y a rien
utile s’il n’est penible, rien ne vaut s’il ne
couste, l’aisance luy est suspecte. Cecy vient
encore de plus haut ; c’est chose estrange, mais
veritable, et qui convainq l’homme d’estre
bien miserable, qu’aucun mal ne s’en va que
par un autre mal, soit au corps, ou en l’ame.
Les maladies spirituelles et corporelles ne sont
guaries et chassées que par tourment, douleur,
peine : les spirituelles par penitence,
veilles, jeusnes, haires, prisons, disciplines,
qui doivent estre vrayement afflictions et
poignantes, nonobstant la resolution et devotion à très volontiers les souffrir ; car si elles
venoient à plaisir ou commodité, elles n’auroient point d’effect ; les corporelles de mesme, par medecines, incisions, cauteres, diettes ; comme sentent bien ceux
qui sont obligez aux reigles medicinales, lesquels
sont battus d’une part du mal qui les poingt
[1]
, et d’autre de la reigle, qui les ennuye. Item les autres maux. L'ignorance, par grand, long, et
- ↑ Qui les poigne ou poind, ainsi qu'on écrit aujourd'hui. L'ancienne orthographe était préferable, comme plus conforme au mot latin pugnit, et même à la prononciation, puisque de d final de poind se prononce t devant une voyelle.