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LIVRE I, CHAPITRE XXXVIII.


guement et avec attention comment il se comporteroit s’il estoit Roy, pape, ou autre chose, qu’il sçait ne pouvoir jamais estre ; et ainsi se paist de vent, et encore de moins, car de chose qui n’est et ne sera point : cettuy-cy songe fort comment il composera son corps, ses contenances, son maintien, ses paroles d’une façon affectée, et se plaist à le faire, comme de chose qui luy sied fort bien, et à quoy tous doivent prendre plaisir. Mais quelle vanité et sotte inanité en nos desirs et souhaits, d’où naissent les creances et esperances encores plus vaines, et tout cecy n’advient pas seulement lorsque n’avons rien à faire, et que sommes engourdis d’oisiveté, mais souvent au milieu et plus fort des affaires : tant est naturelle et puissante la vanité, qu’elle nous desrobe et nous arrache des mains de la verité, solidité et substance des choses, pour nous mettre au vent et au rien !

Encore la plus sotte vanité de toutes est ce soin penible de ce qui se fera icy, après qu’en serons partis. Nous estendons nos desirs et affections au-delà de nous et de nostre estre ; voulons pourvoir à nous estre faict [1]

    copie fidèle, souvent jusqu'à conserver les fautes typographiques qui s'y trouvent, ont écrit c'est pour cest ; mais c'est évidement une faute. L'édition de Dijon en fait une autre en écrivant cet, puisque c'est rajeunir d'un siècle l'orthographe de Charron.

  1. Nous voulons pourvoir aux choses qui doivent être faites, lorsque nous ne serons plus.