plus estrange et contraire
vice, c’est cruauté. Or en cecy les bestes ont
bien de quoy faire rougir l’homme, en ces
huict mots : elles ne s’attaquent et n’offensent
gueres ceux de leur genre, major serpentum ferarumque
concordia quàm hominum
[1] : ne combattent
que pour très grandes et justes
causes, deffense et conservation de leur vie,
liberté, et leurs petits ; avec leurs armes
naturelles et ouvertes, par la seule vive force et
vaillance d’une à une, comme en duels et
non en troupe, ny par dessein ; ont leurs
combats courts et tost expediés, jusques à ce
que l’une soit blessée ou qu’elle cede ; et le
combat finy, la querelle, la haine, et la cholere
est aussi terminée. Mais l’homme n’a querelle
que contre l’homme, pour des causes
non seulement legeres, vaines et frivoles,
mais souvent injustes ; avec armes artificielles
et traistresses ; par fraudes et mauvais moyens ;
en troupe et assemblée faicte avec dessein :
faict la guerre fort longuement et sans fin,
jusques à la mort ; et ne pouvant plus nuire,
encore la haine et la cholere dure.
La conclusion de ceste comparaison est que vainement et mal l’homme se glorifie tant par dessus les bestes. Car si l’homme a quelque chose plus qu’elles, comme est principalement la vivacité de l’esprit et de l’entendement, et les grandes facultés de l’ame ; aussi
- ↑ « Il y a plus de concorde entre les serpents et le bêtes féroces qu'entre les hommes ».