Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome I, 1827.djvu/276

Cette page n’a pas encore été corrigée
218
DE LA SAGESSE,


d’Androdus [1] esclave son medecin, qu’il ne voulsist toucher luy ayant esté exposé, ce qu’Appion dict avoir veu à Rome. Un elephant ayant, par cholere, tué son gouverneur, par repentance ne voulust plus vivre, boire, ny manger. Au contraire il n’y a animal au monde injuste, ingrat, mescognoissant, traistre, perfide, menteur et dissimulé, au pris de l’homme. Au reste, puis que la vertu est en la moderation de ses appetits, et à brider les voluptés, les bestes sont bien plus reiglées que nous, et se contiennent mieux dedans les bornes de nature. Car non seulement elles ne sont point touchées ny passionnées de cupidités non naturelles, superflues et artificielles, qui sont vicieuses toutes, et infinies, comme les hommes qui y sont pour la pluspart tous plongés : mais encore aux naturelles, comme boire et manger, l’accoinctance des masles et femelles, elles y sont beaucoup plus moderées et retenues. Mais pour voyr qui est plus vertueux et vicieux de l’homme ou de la beste, et faire à bon escient honte à l’homme devant la beste, prenons la plus propre et convenable vertu de l’homme, c’est, comme porte son nom, l’humanité ; comme le

  1. La première édition ayant imprimé Androdus pour Androchus, ou plutot pour Androclès, par erreur typographique, toutes les autres éditions que j'ai sous les yeux, excepté celle de Dijon, ont répété cette faute ; mais il est évident que les lettres cl ont été prises pour la lettre d.