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LIVRE I, CHAPITRE XXII.
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CHAPITRE XXII [1].

De l'avarice et de sa contraire passion.


SOMMAIRE. — Ce que c'est que l'avarice. Combien elle a de puissance sur nos esprits. C'est une passion aussi folle que dangereuse. Le mépris des richesses porté à l'excès, mérite aussi le blâme.


Exemples : Mézence. — Sénéque.
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AYMER et affectionner les richesses, c’est avarice ; non seulement l’amour et l’affection, mais encore tout soin curieux entour les richesses, sent son avarice, leur dispensation mesme, et la liberalité trop attentivement ordonnée et artificielle ; car elles ne valent pas une attention ny un soing penible.

Le desir des biens et le plaisir à les posseder n’a racine qu’en l’opinion ; le desreiglé desir d’en avoir est une gangrene en nostre ame, qui, avec une venimeuse ardeur, consomme nos naturelles affections pour nous remplir de virulentes humeurs. Sitost qu’elle s’est logée en nostre cœur, l’honneste et naturelle affection que nous debvons à nos parens et amis, et à nous-mesmes, s’enfuist. Tout le reste, com-

  1. C'est le vingt-troisieème de la première édition.