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LIVRE I, CHAPITRE XIV.


sec, d’où vient que les advancés en aage prevalent en entendement par dessus les jeunes, d’autant que le cerveau s’essuye et s’asseche tousjours plus ; aussi les melancholiques secs, les affligés, indigens, et qui sont à jeun (car la tristesse et le jeusne desseche), sont prudens et ingenieux, splendor siccus ; animus sapientissimus... Vexatio dat intellectum [1] ; et les bestes du temperament plus sec, comme fourmis, abeilles, elephans, sont prudentes et ingenieuses ; comme les humides, tesmoin le pourceau, sont stupides, sans esprit ; et les meridionaux, secs et modérés en chaleur interne du cerveau, à cause du violent chaud externe.

Le temperament de la memoire est humide, d’où vient que les enfans l’ont meilleure que les vieillards, et le matin après l’humidité acquise par le dormir de la nuict, plus propre à la memoire, laquelle est aussi plus vigoureuse aux Septentrionaux : j’entends ici une humidité non aqueuse, coulante en laquelle ne se puisse tenir aucune impression, mais aërée, gluante, grasse et huileuse, qui facilement reçoit et retient fort, comme se voyt aux peinctures faictes en huile : le tempérament de l’imagination est chaud, d’où vient que les frenetiques, maniacles et malades de maladies

  1. « Tempérament sec, esprit très-sage... Les abstinences et austérités donnent de l’intelligence ». — Je traduis ici plutôt d’après ce qui précède, que d’après le sens littéral des paroles.