Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome I, 1827.djvu/139

Cette page n’a pas encore été corrigée
83
LIVRE I, CHAPITRE X.


composés. Du flairement c’est l’odeur ou senteur, qui est une fumée sortant de l’object odoriferant, montant par le nez aux premiers ventricules du cerveau : le fort et violent nuict fort au cerveau, comme le son mauvais : le temperé et bon ait contraire, le resjouit, delecte, et conforte. De l’attouchement est le chaud, froid, sec et humide, doux ou poli, aspre, le mouvement, le repos, le chatouillement.

Le milieu ou l’entredeux dudit object et de l'instrument, qui est l’air non alteré ny corrompu, mais libre et tel qu’il faut.

Ainsi le sentiment se faict quand l’espece sensible se présente par le milieu disposé, à l’instrument sain et disposé, et qu’en iceluy l’esprit assistant la reçoit et apprehende, tellement qu’il y a de l’action et passion, et les sens ne sont pas purement passifs ; car combien qu’ils reçoivent et soient frappés par l’object, si est-ce aussi qu’en quelque sens et mesure ils agissent, en appercevant et apprehendant l’espece [1] et image de l’object proposé.

Anciennement et auparavant Aristote on mettoit difference entre le sens de la veue et les autres sens, et tenoient tous que la veue estoit active, et se faisoit en jettant hors l’œil, les rayons aux objects externes ; et les autres sens passifs, recevant la chose

  1. Espèce nous paraît signifier ici forme. On trouve ce mot employé dans le même sens dix lignes plus bas.