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DE LA SAGESSE,


disposition de nature à la croire, car l’homme desire naturellement allonger et perpétuer son estre ; d’où vient aussi ce grand et furieux soin et amour de nostre posterité et succession : puis deux choses servent à la faire valoir et rendre plausible ; l’une est l’esperance de gloire et reputation, et le desir de l’immortalité du nom, qui tout vain qu’il est, a un merveilleux crédit au monde : l’autre est l’impression que les vices qui se dérobent de la veue et cognoissance de l’humaine justice, demeurent tousjours en butte à la divine, qui les chastiera, voyre après la mort : ainsi outre que l’homme est tout porté et disposé par nature à la desirer, et par ainsi la croire, la justice de Dieu la conclud.

De là nous apprendrons y avoir trois differences et degrés d’ames, ordre requis à la perfection de l’univers. Deux extremes : l’un de celles qui estans du tout materielles, plongées, enfondrées et inseparables de la matière ; et ainsi avec elle corruptibles : ce sont les brutales [1] : l’autre au contraire de celles qui n’ont aucun commerce avec la matiere et le corps, comme les demons immortels : et au milieu est l’humaine qui comme moyenne n’est du tout attachée à

    voir adoucir. Il s’expliquait avec bien plus de hardiesse dans la Ire, édition, comme on pourra le voir à la fin de la longue variante citée en note, dans ce chapitre.

  1. Les ames des bêtes.