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LIVRE I, CHAPITRE VIII.


Aristote, il en sera davantage traitté en son lieu, au discours de l’ame intellective.

Il reste encores le dernier point de l’ame, sa separation d’avec son corps, laquelle est de diverses sortes et genres : l’une et l’ordinaire est naturelle par mort, cette-cy est differente entre les animaux et l’homme : car par la mort des animaux l’ame meurt et est aneantie selon la regle, qui porte que par la corruption du subiect la forme se perd et perit, la matiere demeure. Par celle de l’homme, l’ame est bien séparée du corps, mais elle ne se perd, ains demeure, d’autant qu’elle est immortelle.

L’immortalité de l’ame est la chose la plus universellement, religieusement (c’est le principal fondement de toute religion) et plausiblement retenue par tout le monde : j’entends d’une externe et publique profession ; car d’une serieuse, interne et vraye non pas tant, tesmoin tant d’Epicuriens, libertins, et moqueurs ; toutesfois les Saduceens, les plus gros milours [1] des Juifs n’en faisoient point la petite bouche à la nier : la plus utilement creue, aucunement assez prouvée par plusieurs raisons naturelles et humaines, mais proprement et mieux establie par le ressort de la religion, que par tout autre moyen [2] . Il semble bien y avoir une inclination et

  1. Les plus gros milords, c’est-à-dire, docteurs.
  2. Ce passage est un de ceux que Charron avait cru de-