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DE LA SAGESSE,


ciens et Platoniciens, tenue par plusieurs rabins et docteurs juifs, puis par Origene et autres docteurs chrestiens, dit qu’elles ont esté du commencement toutes créées de Dieu, faictes de rien, et réservées au ciel, pour puis estre envoyées icy bas, selon qu’il est besoing, et que les corps sont formés et disposés à les recevoir ; et de là est venue l’opinion de ceux qui ont pensé que les ames estoient icy bien ou mal traittées et logées en corps sains ou malades, selon la vie qu’elles avoient mené là haut au ciel avant estre incorporées : et certes le maistre de sagesse monstre bien qu’il croit que l’ame est l’ainée et avant le corps, erani puer, bonam indolem sorlitus, imo bonus cum essein, corpus inconiaminatum reperi [1]. La quatriesme receue, et qui se tient en la chrestienté, est qu’elles sont toutes créées que Dieu, et infuses aux corps préparés, tellement que sa création et infusion se fasse en mesme instant. Ces quatre opinions sont affirmatives : car il y en a une cinquiesme plus retenue, qui ne définit rien, et se contente de dire que c’est une chose secrette et incognue aux hommes, de laquelle ont esté sainct Augustin, Grégoire et autres, qui tou-

  1. « J’étais enfant, j’avais reçu en partage un bon naturel ; et, comme j’étais bon, je trouvai un corps sans souillure ». Lib. Sapient. C. VIII, V. 19 et 20. — Charron a un peu altéré le texte : nous le rétablissons ici : Puer autem erarn ingeniosus, et sortitus sum animam bonam. — Et cum esseni magis bonus, veni ad corpus incoinquinatum.