un lieu, ils ne peuvent estre ailleurs, et ne sont en
lieu on infini, ou très grand ou très petit, mais égal
à leur mesurée et finie substance et superficie. Et si
cela n’estoit ainsi, les esprits ne changeroient point
de lieu, ne monteroient ny ne descendroient, comme
l’escriture affirme qu’ils font, et par ainsi seroient
immobiles, indivisibles, seroient par-tout indifféremment : or, est-il qu’ils changent de lieu ; le changement
convainq qu’ils sont mobiles, divisibles, subjects
au temps et à la succession d’iceluy, requise au, mouvement et passage d’un lieu à autre, qui sont
toutes qualités d’un corps. Mais pource que plusieurs
simples, soubs ce mot de corporel, imaginent visible,
palpable, et ne pensent que l’air pur, ou le feu hors
la flamme et le charbon soient corps, ils ont dict
que les esprits, tant séparés que humains, ne sont corporels, comme de vray ils ne le sont en ce sens ; car
ils sont d’une substance invisible, soit aërée, comme
veulent la plus part des philosophes et théologiens ;
ou celeste, comme aucuns Hebrieux et Arabes, appellans
de mesme nom le ciel et l’esprit essence propre
à l’immortalité, ou plus subtile et deliée encores,
si l’on veut, mais tousjours corporelle ; puis qu’elle
est finie et limitée de place et de lieu, mobile, subjecte au mouvement et au temps : finalement, s’ils
n’estoient corporels, ils ne seroient pas passibles, et
capables de souffrir comme ils sont ; l’humain reçoit
de son corps plaisir, desplaisir, volupté, douleur,
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LIVRE I, CHAPITRE VIII.