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DE LA SAGESSE,


stance : et ne pourroit estre sans ce corps, dusquel elle est acte et perfection ; non plus que le couvercle d'une maison ne peust sans icelle, et un relatif


    et changeant, et estant bon pour une fonction d’ame, est contraire à l’autre ; estant chaud et humide en la jeunesse, est bon pour la vegetative, et mal pour la raisonnable ; et au contraire froid et sec en la vieillesse, est bon pour la raisonnable, mal pour la vegetative. Par maladie ardente fort eschaufé et subtilisé, est propre à l’invention et divination, mais impropre à maturité et solidité de jugement et sagesse.

    De l’unité et singularité ou pluralité des ames en l’homme, les opinions et raisons sont fort diverses entre les sages. Qu’il y en aye trois essentiellement distinctes, c’est l’opinion des Égyptiens, et d’aucuns grecs comme platoniciens. Mais c’est chose estrange qu’une mesme chose aye plusieurs formes essentielles. Que les ames soient singulieres, et à chascun homme la sienne ; c’est l’opinion de plusieurs, contre laquelle l’on dict qu’il faudroit ou qu’elle fust toute mortelle, ou bien en partie mortelle en la vegetative et sensitive, et en partie immortelle en la raisonnable, et ainsi seroit divisible. Qu’il n’y en aye qu’une seule raisonnable generalement de tous hommes ; c’est l’opinion des arabes, venue de Themistius grec, mais refutée par plusieurs. La plus commune opinion est qu’il n’y en a en chascun homme qu’une en substance, cause de la vie et de toutes les actions ; laquelle est toute en tout, et toute en chaque partie ; mais elle est garnie et enrichie d’un très grand nombre de diverses facultés et puissances, merveilleusement differentes, voyre contraires les unes aux autres, selon la diversité des vaisseaux et instrumens où elle est retenue, et des objects qui luy sont proposez. Elle exerce l’ame sensitive et raisonnable au cerveau ; la vitale