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DE LA SAGESSE,


par ces derniers plus maigrement, comme toute la philosophie, mais avec grande diversité d'opinions, selon les diverses nations. [1]

  1. très grande dispute et diversité d’opinions entre les philosophes et les theologiens. Il y a eu quatre opinions celebres : selon la premiere, qui est des Stoïciens, tenue par Philon, juif, puis par les Manichéens, elles sont extraites et produictes comme parcelles de la substance de Dieu, qui les inspire aux corps : la seconde d’Aristote, tenue par Tertulien, Apollinaris, les Luciferiens et autres chrestiens, dit qu’elles viennent et dérivent des ames des parens avec la semence, ainsi que les corps, à la façon des ames brutales, vegetatives et sensitives : la troisième des Pythagoriciens et Platoniciens, tenue par plusieurs rabins et docteurs juifs, puis par Origene et autres docteurs chrestiens, dit qu’elles ont esté du commencement toutes creées de Dieu, faites de rien, et reservées au ciel, puis envoyées icy-bas, selon qu’il est besoing aux corps formés et disposés à les recevoir : la quatriesme, receue en la chrestienté, est qu’elles sont creées de Dieu, et infuses aux corps preparés, tellement que sa creation et infusion se fasse en mesme instant. Ces quatre opinions sont affirmatives : car il y en a une cinquiesme plus retenue qui ne definist rien, et se contente de dire que c’est une chose secrette et incognue aux hommes, de laquelle opinion ont esté SS. Augustin, Gregoire de Nice et autres : qui toutesfois ont trouvé les deux dernieres affirmatives, plus vraysemblables que les deux premieres.

    Le siege de l’ame raisonnable, ubi sedet pro tribunali (a), c’est le cerveau et non pas le cœur, comme, avant Platon et

    (a) « Où elle siége comme sur un tribunal ».