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Par la cognoissance de soy l’homme monte et arrive plustost et mieux à la cognoissance de Dieu, que par toute autre chose, tant pour ce qu’il trouve en soy plus de quoy le cognoistre, plus de marques et traicts de la divinité, qu’en tout le reste qu’il peut cognoistre ; que pource qu’il peut mieux sentir, et sçavoir ce qui est et se remue en soy, qu’en toute autre chose. (…) dont estoit gravée en lettres d’or sur le frontispice du temple d’Apollon, Dieu (selon les payens) de science et de lumiere, ceste sentence, cognois-toy, comme une salutation et un advertissement de Dieu à tous, leur signifiant que pour avoir accez à la divinité et entrée en son temple, il se faut cognoistre ; qui se mescognoist en doit estre debouté. (…). Pour devenir sage et mener une vie plus reglée et plus douce, il ne faut point d’instruction d’ailleurs que de nous. Si nous estions bons escholiers, nous apprendrions mieux de nous que de tous les livres. Qui remet en sa memoire et remarque bien l’excez de sa cholere passée, jusques où ceste fievre l’a emporté verra mieux beaucoup la laideur de ceste passion, et en aura horreur et hayne plus juste, que de tout ce qu’en dient Aristote et Platon : et ainsi de toutes les autres passions, et de tous les bransles et mouvemens de son ame. Qui se souviendra de s’estre tant de fois mesconté en son jugement, et de tant de mauvais tours que lui a faict sa memoire,