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crains qu’elle ne prenne de l’inquiétude, il se fait tard, il faut s’en aller au logis ; nous ne marcherons pas bien vîte, et chemin faisant je vous dirai ce qui me fit répondre comme j’ai fait à ma mere.

Il y a, continua-t-elle, dans le mariage quelque chose que je ne comprends pas du tout. J’ai vu à Estival une famille de paysans dans laquelle une fille aînée, méchante, acariâtre, qui tourmentoit son mari, battoit ses enfans, et n’avoit point d’égards pour pere ni mere, étoit soufferte et même considérée. On la voyoit toujours grosse, et on ne l’en ménageoit que plus. Sa sœur cadette, bonne, douce, aimable, active, à qui on n’avoit pas permis d’épouser un jeune laboureur son voisin, fut soupçonnée de le voir en secret, et aussi-tôt on la