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Le départ ressembla donc à une fête, mais dès les premiers jours, les difficultés surgirent : rivières et marais entravèrent la marche ; il fallut en maint endroit construire des chaussées et bâtir des ponts, tandis que les habitants des villes et des villages indiens, effrayés de cette invasion nouvelle, abandonnaient leurs demeures et fuyaient dans les bois, en ayant soin d’emporter leurs vivres.

Les privations commencèrent, puis la famine suivie des maladies qui en sont les compagnes habituelles ; et cette expédition si brillamment entreprise ressembla bientôt à une effroyable déroute. Point de chemins tracés autres que les sentiers indiens, qui ne pouvaient servir à la cavalerie ; nulle direction certaine ; on errait au hasard, et souvent, malgré la boussole, les malheureux revenaient à leur point de départ ; hommes et chevaux succombaient ; quant aux Indiens, qui portaient tout le poids de la fatigue, ils mouraient par centaines.

Les jours, les mois s’écoulèrent ; Cortez persévérait malgré les siens dans sa funeste résolution d’atteindre le Honduras par ces chemins affreux.

Ce fut ainsi que les Espagnols, désespérés, débouchèrent sur les bords de la lagune. La troupe, à moitié décimée, s’y retrempa dans un repos de quelques jours, grâce à la libéralité du prince indien, dont la petite capitale se détachait toute blanche sur les eaux bleues du lac.

Ce prince vint en personne visiter les Espagnols, et Cortez se résolut à l’accompagner à Tayasal ; il avait hâte de visiter cette ville et ces temples qui, tous élevés sur pyramides, la dominaient d’une grande hauteur ; la plupart étaient construits en pierres taillées, avec leurs intérieurs en encorbellement, et leurs murailles, ornées de bas-reliefs, étaient en outre couvertes de peintures éblouissantes.

Cortez emmena même son cheval Morcillo, qui était blessé et qu’il abandonna derrière lui en le recommandant aux soins du Canek ; c’était le nom générique des princes. Les Indiens, prenant le cheval pour un dieu, s’empressèrent, après le départ