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tandis que le peso de oro commun valait seulement 1 piastre 75, 8 fr. 75 de notre monnaie ; de sorte qu’en prenant la moyenne de 10 francs, cela faisait 20 000 francs par an, ce qui équivaudrait aujourd’hui à une somme d’au moins 100 000 francs. Diego Velasquez fit venir à Cuba une nichée de cochons qui en trois ans se multiplièrent au nombre de trente mille, si bien que l’on put créer dans l’île, comme à Chicago et Cincinnati, des établissements pour la préparation des viandes salées destinées aux navires partant à la découverte et à ceux qui se rendaient à la côte d’Afrique pour faire la traite. De Cuba on envoyait des porcs vivants ou salés dans le Darien, à Mexico et en Floride.

« Mais si l’animal abondait dans les Antilles, il était fort rare dans le Pérou, et comme au contraire l’or y était très abondant, les cochons, dans le principe, y atteignirent, des prix qu’on n’oserait croire. Cieza et Garcilaso racontent qu’un nommé Georges Robledo paya 20 000 francs une truie et un cochon, et que la truie fut servie le jour même dans un banquet. Ce qui ferait un plat de 50 000 francs.

— Ah ! quel plat ! dit François.

— Quant aux petits cochons de lait, on les payait 100 piastres d’or, 1000 francs d’autrefois, ou 10000 francs d’aujourd’hui. Le cochon, vous le savez, est l’un des animaux les plus utiles de la création ; il est à présent répandu par toute la terre, et dans les îles du Pacifique, où on l’engraisse avec des cocos, c’est presque la seule nourriture animale que consomment les naturels. Dans la Nouvelle-Guinée, point de fête, de cérémonie publique, civile ou religieuse, sans le sacrifice d’un cochon ; aussi faut-il voir avec quel soin on les élève et de quelle tendresse on les entoure ! ils partagent la nourriture de leurs maîtres, couchent dans la même case, et les missionnaires affirment avoir vu des cochons allaités par les femmes en même temps que leurs enfants.

— De petits frères, dit François.

— Enfin, pour en finir avec le sujet qui nous occupe, j’ajouterai que les Espagnols en menaient partout avec eux ; vous devez même vous rappeler que Cortez, dans son expédition du